Une spiritualité au temps du SIDA[1]

Frontières, 2, 2 (automne 1989), 12-17.


À la mémoire de Jean-Gilles Godin qui, blessé par l'Ange Noir du Sida, s'est battu contre lui pendant une longue nuit. Puisse la blessure être devenue, pour lui, bénédiction.

 

 

Il n'est pas facile trouver ce qu'on pourrait appeler «le ton juste» pour parler du SIDA, de l'expérience de ceux et celles qui vivent avec le SIDA, mais aussi bien de ce monde dans lequel nous sommes pris pour vivre avec cette redoutable maladie sans doute un bon moment encore. On se sent en effet comme écartelé entre l'envie de hurler - de colère, de révolte ou de défi -, celle de pleurer - de tristesse, d'impuissance ou de rage -, mais aussi, simplement, de se taire - par pudeur, par respect, ou juste par conscience de la prodigieuse prétention, de la vertigineuse futilité des mots... Pourtant, dans ce vaste combat qu'est la lutte pour la vie et pour l'espoir, toutes les ressources, en fin de compte, doivent être mises à contribution: la science, l'argent, le temps, la tendresse - et sans doute aussi, dès lors, ces choses infiniment fragiles que sont les mots.

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Sida et spiritualité...

En voyant ces deux mots associés, il nous vient fort probablement, en vrac et pêle même, toute sorte d'images, toute sorte d'autres mots: Dieu, foi, doute, valeurs, morale, amour, culpabilité, sagesse, souffrance, angoisse, compassion, mort, vie, espoir - et bien d'autres encore...

Ce qu'on appelle - sans toujours très bien savoir ce qu'on veut dire par là - «spiritualité», «sagesse de vie», «expérience intérieure», «religieuse» ou «mystique» , semble en tout cas avoir au moins ceci de commun avec le SIDA que cela concerne ce qu'on pourrait appeler, pour reprendre la vieille expression de la Bible, le «combat des humains avec l'Ange», l'expérience - la bataille - des hommes et des femmes «autour» des limites de la condition humaine et de ce qui la déborde. Si la réalité du SIDA nous interpelle aussi directement, aussi brutalement aujourd'hui au plan de la «spiritualité», c'est bien possiblement parce que, dans une large mesure, nous vivons dans un monde où nous avons souvent la tentation de croire qu'il n'y a plus de limites, que celles-ci ont été abolies:

- plus de limites aux horizons que la science explore - que ce soit dans l'infiniment grand, l'infiniment petit ou l'infiniment complexe;

- pas de limites à la puissance que la technique met en oeuvre et au progrès qu'elle permet d'entrevoir;

- pas de limites à la créativité, à l'inventivité humaine;

- pas de limites, non plus, au désir que tous et toutes nous portons en nous et aux possibilités de l'accomplir sans contrainte ni retenue;

- pas de limites à la vie elle-même, à la possibilité de la fabriquer presque, déjà, d'en améliorer la qualité, de la prolonger de plus en plus, voire - pourquoi pas - à l'inifini...

Ou bien, alors - et ce serait au fond une autre manière de dire à peu près la même chose -, nous avons le sentiment de vivre dans un monde que nous contrôlons . De contrôler le monde dans lequel nous vivons:

- nous partageons l'ambition d'une société qui continue - «Phase II» de la Baie James - de harnacher les rivières pour produire de l'électricité;

- nous avons encore au moins l'«illusion démocratique» de pouvoir élire ceux qui nous gouvernent;

- la terre que nous habitons a été sillonnée par d'innombrables réseaux de communications - qui faisaient dire à MacLuhan que la planète était devenue un «village global» où l'on sait tout ce qui se passe, presque instantanément;

- nous vivons dans des maisons chauffées en hiver et climatisées en été, dans un monde où tout est prévu, géré, «sous contrôle». De notre naissance à notre mort - celle-ci comprise! -, nous sommes «pris en charge» par les institutions et les spécialistes de toutes sortes, des pédiatres aux thanatologues, en passant par les dentistes, les psycho-thérapeutes, les sexologues, les agents d'assurance et les réparateurs Maytag...

Or, si le SIDA nous interpelle aussi directement au plan de ce qu'on peut appeler une «interrogation spirituelle», c'est vraisemblablement parce qu'il vient brutalement nous rappeler la présence de brutales limites au coeur de notre monde, de nos vies, de nos désirs. C'est parce qu'il vient brutalement nous rappeler les limites de notre contrôle .

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Certains se souviendront sûrement d'avoir lu, dans une livraison du Devoir de novembre dernier, la fort intéressante réflexion d'un professeur de philosophie, Pierre Bertrand, à partir du tremblement de terre qui venait de secouer le Québec quelques jours auparavant. «Il faut, écrivait Bertrand, que les puissances du dehors absolu fassent inopinément intrusion dans nos habitudes de vie pour que nous nous mettions à mettre en doute la belle assurance qui est la nôtre.» Et même là, ce n'est pas si évident que ça: il nous faut en effet toujours beaucoup de temps pour enregistrer ce qu'il y a d'imprévu , d'inédit dans un évènement comme celui-là. Nous le savons, nous l'avons tous plus ou moins vécu ainsi: nous ramenons tout d'abord cet inédit à du familier, à du connu: c'était les enfants qui faisaient du bruit dans la chambre ou qui donnaient des coups de pied sous la table, les chats qui se couraient après dans le couloir, la laveuse qui vibrait plus fort que d'habitude, un autobus ou un gros camion qui passait dans la rue...

«En fait, poursuivait le professeur de philosophie, la prise de conscience du tremblement de terre comme tel n'eut lieu qu'après coup, comme dernière hypothèse explicative, après que toutes les autres furent essayées et épuisées. Tellement l'inconnu doit insister avant que nous acceptions de lui ouvrir enfin la porte, et combien nous sommes prompts à la lui refermer sur le nez à la première occasion» - à travers nos bavardages, par exemple, ou ceux des média, qui finissent rapidement par banaliser complètement l'évènement. Pourtant, de conclure, le philosophe: «Il ne faut pas s'empresser d'oublier trop rapidement ces moments où le dehors surgit à l'intérieur de nos vies. Il y a là quelque chose qui gronde en dessous de nos certitudes».

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L'image est forte, mais elle donne à penser: le SIDA est un tremblement de terre dans nos vies. C'est un ébranlement des certitudes sur lesquelles nous vivions depuis un moment déjà - aussi bien celle d'une sexualité sans «risques» et sans «conséquences» que celle de la toute puissance de la science à nous délivrer de ce qui nous empoisonne encore l'existence. Et même là, il nous faut une très forte secousse sur l'échelle de Richter de nos certitudes pour vraiment ébranler celles-ci: combien parmi nous, par exemple, échappent complètement à la tentation, quand ils pensent au SIDA, de penser d'abord au moment où cette «toute puissance» de la science et du progrès médical aura enfin trouvé un remède, un vaccin, un antidote - une «solution»?

Une telle attitude est bien sûr tout à fait compréhensible et légitime. Mais elle amène à suggérer que, par comparaison, la spiritualité , ce serait probablement, plutôt, la manière d'habiter humainement le présent, de donner un sens au présent dans lequel nous sommes pris pour vivre - d'une manière ou d'une autre - avec le SIDA, comme avec nos vieilles certitudes ébranlées par le tremblement de terre.

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Dans un monde comme le nôtre, par ailleurs, parler de spiritualité, c'est parler de quelque chose que plusieurs d'entre nous avions plus ou moins rangé depuis un bon moment dans la naphtaline - quand nous ne l'avions pas simplement «mis au chemin», avec les vieilleries inutiles et encombrantes.

Parler de spiritualité dans un monde comme le nôtre, c'est aussi, nécessairement, parler au pluriel . Et le fait est que l'apparition du SIDA dans le paysage de nos vies a fait émerger toutes sortes de recherches, de questionnements spirituels, souvent très différents les uns des autres - allant par exemple de la redécouverte d'une expérience religieuse très traditionnelle (au sens pas du tout péjoratif du terme) à l'exploration de pistes nouvelles, ou en tout cas moins familières à nos traditions occidentales - qu'il s'agisse par exemple de diverses «techniques de soi», de diverses formes d'auto-thérapie ou d'actualisation des pouvoirs souvent insoupçonnés de guérison que nous portons en nous.

Sauf à se situer dans une perspective très étroitement confessionnelle, il est difficile de soutenir que des spiritualités seraient plus «vraies» que d'autres. On admettra plus volontiers qu'il y a plutôt des façons différentes d'habiter humainement un présent, de «négocier» avec des limites. En revanche - et il est important de ne pas l'oublier -, les voies que peut emprunter cette recherche de spiritualité sont fort différentes les unes des autres, et elles peuvent même, à l'occasion, paraître contradictoires ou incompatibles entre elles. On peut ainsi penser - et l'exemple est loin d'être purement théorique - à la confrontation qu'il peut y avoir entre des «voies spirituelles» davantage centrées sur un «apprivoisement» de la souffrance et de la mort, disons, et d'autres qui, au nom d'un combat acharné «pour la vie», pourraient être tentées de considérer les premières comme une sorte d'«abdication», voire une «trahison défaitiste». En ce sens là, on peut penser qu'il nous faut, tous, et en tout état de cause, faire de la place dans nos démarches pour une «spiritualité de la tolérance et de la cohabitation».

Mais on peut également songer à des courants spirituels issus de traditions très différentes de la nôtre, qui ont cependant influencé plusieurs de nos contemporains depuis un certains nombre d'années: spiritualités d'origine orientale notamment, pour lesquelles notre petit «moi» n'est au fond qu'une illusion bien fragile et bien éphémère. Pour bien des courants spirituels ainsi marqués par l'Orient, nous ne sommes que des lieux passagers où la vie se cristallise un moment, où la vie parle un instant avec notre précaire petit «JE» - avant que celui-ci ne retourne, comme une goutte d'eau, à l'insondable «océan de l'être» d'où il provient. On comprend aisément que, dans un paysage spirituel de ce type, le drame qui affecte l'histoire particulière de chacun de nos petits «moi» n'a pas la même résonnance qu'il a sans doute pour la majorité d'entre nous. À la limite, la mort elle-même y est perçue davantage comme une libération que comme une tragédie...

Pour le meilleur et pour le pire, l'Occident auquel nous appartenons nous a appris à accorder une importance beaucoup plus grande - voire absolue - aux petits «moi» que nous sommes et qui ont, pour cette raison, beaucoup de mal à accepter la limite de leur minuscule royauté - que ce soit celle de la frustration du désir, de l'échec, de la maladie, et, bien sûr, la plus scandaleuse de toutes: celle de la mort, surtout lorsque cette limite surgit (comme un tremblement de terre) au moment où on s'y attend le moins, comme c'est le cas des maladies incurables qui frappent les enfants, par exemple, et comme c'est le cas du SIDA, qui semble s'en prendre avec une cruauté particulière à des hommes et à des femmes au plus vigoureux de leur vie, au creux de leur plus vivante passion.

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Dans cette tradition occidentale qui est la nôtre (que l'on soit beaucoup, un peu, très mal ou pas du tout croyant) viennent à l'esprit un certain nombre de «figures», susceptibles d'inspirer notre recherche d'une spiritualité au temps du SIDA, et qui ont entre autres choses l'intérêt de nous montrer - si l'on en doutait vraiment - que les questions fondamentales auxquelles le SIDA nous confronte aujourd'hui sont loin d'être complètement nouvelles. On en retiendra deux, parmi bien d'autres possibles.

La première de ces figures est connue - quoique souvent assez mal, et de manière plus ou moins caricaturale. C'est celle de Job, héros fictif d'un récit vieux de 2500 ans, qui pose au fond une seule question - laquelle n'a jamais, depuis lors, cessé de hanter la conscience occidentale (jusqu'à Camus par exemple, en notre temps): pourquoi les humains souffrent-ils - et, surtout, pourquoi la souffrance des innocents ?

Dans le récit biblique, Job est présenté comme un «honnête homme», un «juste», qui vivait à l'aise, heureux et sans histoire. À partir de là, l'auteur imagine un scénario où Dieu permet à Satan (qui est un peu, si l'on ose dire, son «exécuteur des sales boulots») de mettre Job à l'épreuve, pour voir si celui-ci va demeurer aussi «fidèle» dans ses malheurs. Job perd ses biens, il perd ses enfants -- un peu comme Martin Grey dans son récit autobiographique. Ça l'affecte, bien entendu, mais ça ne l'ébranle pas dans ses assises profondes: Job accepte que Dieu reprenne ce qu'il lui avait donné. Même atteint dans son propre corps par une lèpre répugnante, Job refuse de suivre sa femme qui lui conseille de maudire Dieu à cause de la manière dont celui-ci l'a injustement traité.

C'est alors que trois de ses amis viennent pour le réconforter. Ceux-ci arrivent avec les «gros sabots» de leur bonne volonté et de leur bonne conscience: ils ne sont évidemment pas eux-mêmes aux prises avec le drame de Job! Et, au fond, les trois finissent par défendre les croyances traditionnelles de leur époque en essayant de convaincre Job que ce qui lui arrive est certainement de sa faute, qu'il s'agit sûrement d'une punition divine - puisque Dieu est juste... Mais Job n'est pas d'accord et il proteste de son innocence, en même temps qu'il se heurte au mystère de ce Dieu que lui aussi, pourtant, il continue de croire juste. Job se débat avec sa question, oscillant entre la révolte et la résignation, entre des crises de souffrance et des périodes de rémission.

Arrive encore un autre personnage qui, du haut de sa certitude, se met à faire la leçon à tout le monde, en prétendant, lui, carrément, justifier la conduite de Dieu. Mais, là, c'est Dieu lui-même qui en a pour ainsi dire assez, et qui intervient pour dire aux amis de Job: «bon, ça suffit, vous parlez à travers votre chapeau...» Pourtant, Dieu ne répond pas vraiment lui non plus à la question de Job - sinon en manifestant qu'il est plutôt d'accord avec celui-ci, que ce qui arrive à Job n'a, de fait, rien à voir avec une quelconque «punition». Mais Dieu n'essaie pas davantage de se défendre lui-même ou de s'expliquer.

Ce qui ressort de ce récit c'est que, au fond, il n'y a pas de réponse - au moins, en tout cas, au plan des explications rationnelles. Dieu se contente de demander à Job - et ce sont parmi les plus belles pages de la Bible qu'il faut hélas se résoudre à résumer ici bien rapidement: «Job, étais-tu là quand j'ai fait le monde, quand j'ai installé le ciel et fixé les étoiles? Où étais-tu, Job, quand j'ai organisé la terre et semé la vie dans les océans, quand j'ai réglé le cours des astres et celui des saisons?...»

Et Job prend conscience de la limite à laquelle il se heurte, malgré sa sagesse et son intelligence: celle d'un univers qui le dépasse, d'un monde où les choses fonctionnent en général plutôt bien - mais où il leur arrive aussi à l'occasion de se dérégler. Un monde où il se produit aussi, de temps en temps, des tremblements de terre. Quelque chose pourtant, devant cet ordre grandiose de la Création qui se déploie devant lui, réduit sa révolte au silence d'une confiance que la raison seule ne saurait expliquer.[2]

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Nous ne sommes pas si loin ici, quand on y pense, d'une spiritualité d'inspiration très différente: celle de la Chine ancienne - que l'on retouve par exemple dans le taoïsme et le Yi-king ; une spiritualité fondée essentiellement sur la conviction que le monde est en perpétuelle transformation - comme le courbe d'un biorythme - et que les humains ont le choix: ou bien de se casser les dents et de se rendre malheureux à vouloir qu'il en soit autrement, ou bien de se mettre en harmonie avec ce mouvement du monde, et de faire la paix avec ce mystère d'un univers dont le sens, ultimement, échappe à notre entendement.

Étrangement, nous ne sommes pas très loin non plus d'une autre «spiritualité» très différente : celle de la «responsabilité» et du «projet», dans la philosophie - athée - de Jean-Paul Sartre pour qui, dans ce monde en lui-même absurde , le sens ne peut être donné que par les humains eux-mêmes. (Comme le disait Sartre, par exemple, à propos de Jean Genet, devenu écrivain et poète même si toute son éducation avait d'abord fait de lui un criminel et un voleur: «l'important n'est pas ce que l'on a fait de nous mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce que l'on a fait de nous».)

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La deuxième figure que l'on évoquera rapidement ici est connue elle aussi, et même beaucoup plus sans doute - quoique souvent de manière également un peu simpliste. C'est celle de François d'Assise, que l'on se représente peut-être un peu trop à la manière naïve des images pieuses - ou à celle de Zeffirelli! - avec des grands yeux candides en train de parler aux petits oiseaux... On aura plutôt ici à l'esprit un très beau texte de François d'Assise, le Cantique des créatures - qui est une grande prière de louange, de reconnaissance pour la beauté du monde, dans laquelle saint François[3] se présente en quelque sorte comme le frère de toutes les créatures:

Loué sois-tu, Seigneur, pour notre frère, monseigneur le Soleil,

et pour notre soeur la Lune;

pour notre frère le Feu et pour notre soeur l'Eau;

loué sois-tu pour la Terre, notre soeur et notre mère,

et pour mon frère, le Corps;

mais, aussi, loué sois-tu pour notre soeur la Mort

- à qui nul vivant ne peut échapper...

 

Nul ne peut dire, bien sûr, si François d'Assise, aujourd'hui, pousserait l'audace jusqu'à parler, dans sa louange, de «son frère», le SIDA...

L'auteur de ces pages n'aurait sans doute pas eu lui-même celle de le proposer s'il ne l'avait entendu presque dans ces termes l'été dernier, dans la bouche d'un jeune prêtre vivant depuis un moment avec le SIDA. Et celui-ci d'exprimer comment, après un temps de révolte et de colère (que personne n'aura de mal à comprendre), il avait fini par apprivoiser cette proximité de la mort au travail dans son corps - comme on le dit pour un douloureux travail d'enfantement; et que, à travers cette sorte d'étrange amitié, de mystérieuse et presque fraternelle complicité avec le SIDA, c'est avec la VIE qu'il était en train de régler ses comptes, de se réconcilier.

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Il y a sans nul doute bien d'autres voies possibles en vue d'une spiritualité «au temps de SIDA», y compris dans cette tradition de l'Occident judéo-chrétien qui nous marque souvent plus que nous ne pensons, même à notre insu:

celle des croyants qui vivent la souffrance de leur corps comme communion à celle du Christ - un juste , lui aussi injustement mis à mort;

celle pour laquelle il est illusoire de prétendre rencontrer Dieu ailleurs qu'à travers les hommes et les femmes qui, justement parce qu'ils ont mal dans leur corps et dans leur âme, sont, parmi nous, les frères et les soeurs privilégiés de Jésus-Christ («Ce que vous aurez fait au plus fragile d'entre ces êtres douloureux qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'aurez fait» . Évangile de saint Mathieu , 25);

ou celle encore - plus guerroyante - des preux chevaliers qui se battent héroïquement jusqu'à la mort - avec la conviction que ce n'est pas la mort qui aura le dernier mot...

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Ces pages ont voulu autant que possible éviter «le coup» des amis de Job - qui prétendaient avoir LA réponse... D'une manière infiniment plus modeste, elles ont plutôt cherché à exprimer le souhait que nous nous laissions ébranler par ce «tremblement de terre» qui surgit dans nos vies sans crier gare. Mais aussi bien, comme le suggérait le beau texte de Jean-Gilles Godin paru dans le Devoir du 1er décembre 1988, que nous ayons le courage de croire que l'espoir ne peut pas être «faux» si on le place là où est le seul véritable lieu de la «spiritualité»: celui du coeur.

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1 Texte établi à partir d'une causerie présentée lors de la journée «portes ouvertes» organisée par le Comité SIDA-Aide Montréal [C-SAM] à l'occasion de la Journée mondiale du SIDA, le jeudi, 1er décembre 1988. |retour au texte|

 

2 Pour la tradition chrétienne, c'est le Christ, bien sûr, qui, à travers saint Paul, donnera en quelque sorte sa «réponse» à Job, à la fois par la promesse de la résurrection (cf. la Lettre aux Romains 8, 18 : «Les souffrances du temps présent ne sont rien à côté de la gloire qui doit se révéler en nous») et l'affirmation que la souffrance, malgré sa scandaleuse irrationalité, n'est pas «inutile» (cf. la Lettre aux Colossiens 1, 24: «Je complète dans ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son corps qui est l'Église» - c'est-à-dire la communauté concrète des hommes et des femmes qui le suivent). |retour au texte|

 

3 Je veux remercier Patrick Celier d'avoir signalé, dans l'échange qui a suivi cette conférence, que François d'Assise composa cette prière non pas dans l'enthousiasme de sa jeunesse mais au contraire vers la fin de sa vie, alors qu'une maladie des yeux le faisait beaucoup souffrir et le rendait presque aveugle. La fraîcheur de cette prière, dans ce contexte, acquiert un impact encore plus émouvant. |retour au texte|

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