3

éléments pour une théorie de la religion[1]


Le sacré et le profane, d'hier à demain

dans le collectif Figures contemporaines du sacré : religion et culture au Québec.
Sous la direction de Y. Desrosiers. Montréal, Fides, 1986.

 


 

Ce qui fait la spécificité d'une interprétation, en sciences humaines, c'est le regard théorique avec lequel elle s'élabore. Si l'on utilise une théorie psychologique (par exemple: freudienne, behavioriste, transpersonnelle, etc.), on aura bien sûr une interprétation de type psychologique. Si l'on se réfère en revanche à une théorie sociologique (par exemple: marxiste, fonctionnaliste, etc.), on interprétera les choses de telle ou telle manière sociologique. Une interprétation religiologique, pour sa part, et quel que soit le nom qu'on lui donne[2], a ainsi besoin de se référer à une théorie de la religion. C'est ce «coffre d'outils» théoriques de la religiologie, pourrait-on dire, que cette section entend présenter, à partir de son concept central et fondamental: le sacré.

 

Il y a bien des manières d'aborder une réflexion religiologique sur le sacré et sur les rapports que les humains entretiennent avec lui. Les pages qui suivent vont tenter de le faire en suivant deux pistes différentes, mais qui se rejoignent néanmoins en maints endroits et qu'on pourrait voir comme complémentaires: la première serait de quelque manière plus «expérientielle» et phénoménologique, tandis que la seconde s'inscrirait davantage dans une «dynamique» socio-anthropologique de la culture.

 

1. L'EXPERIENCE HUMAINE DU SACRÉ COMME EXPERIENCE DU TOUT AUTRE

 

1.1 Le fascinant et le terrifiant

L'une des grandes figures de l'anthropologie religieuse du début de ce siècle, l'Allemand Rudolf OTTO[3], proposait de comprendre le sacré comme étant d'abord et avant tout une expérience, d'ordre affectif, émotionnel, - bien que celle-ci tende généralement à se prolonger, par la suite, en représentations, en images, en catégories intellectuelles, en pratiques, - bref, pourrait-on dire, en institutions religieuses. (Le religion, en ce sens, serait donc, très simplement, l'institutionnalisation de l'expérience du sacré, - du sacré institué, par rapport au sacré instituant de l'expérience elle-même[4].)

L'expérience du sacré serait ainsi une certaine manière d'appréhender le monde (l'univers, l'environnement social, les événements, etc.), l'intuition vive d'une sorte de présence mystérieuse, de «quelque chose» (ou, éventuellement, de «quelqu'un») au-delà des limites habituelles de l'expérience humaine[5]; «quelque chose» (ou «quelqu'un») qui serait totalement autre, si l'on peut dire, par rapport à l'expérience habituelle, et qui, de ce fait, échapperait aux conditions habituelles de l'expérience, mais qui, pourtant, s'y manifesterait parfois de quelque manière, ferait parfois irruption dans l'expérience humaine ordinaire. Les formes sous lesquelles les humains ont cru saisir, expérimenter, cette manifestation du tout autre ont beaucoup varié selon les époques et les cultures: parfois, c'était à travers les forces grandioses - et souvent terribles - de la nature, et parfois à travers son émouvante beauté; parfois, à travers les qualités exceptionnelles de tel personnage, l'intensité de telle émotion, le choc de telle intuition. Toujours, cependant, avant d'être nommée, mise en mots, cette expérience est d'abord intensément vécue.

Otto - entre autres - fait par ailleurs remarquer que cette expérience du sacré, à travers la grande diversité de ses manifestations, porte toujours de quelque manière la marque d'une ambivalence fondamentale (qui peut également servir d'indice quand on tente de la repérer): le sacré, selon des accents qui peuvent bien sûr varier, est en effet toujours expérimenté comme étant à la fois fascinant et terrifiant, attirant et repoussant[6]. (L'espèce de sentiment que la plupart des gens éprouvent sans doute devant le déchaînement d'un orage, au sein d'une foule surexcitée ou dans l'expérience de la sexualité, par exemple, peut sans doute suggérer ce caractère intense et ambivalent - i.e. vécu à la fois comme dangereux et séduisant - de l'expérience du sacré.)

 

1.2 Le sacré et la pensée symbolique

C'est essentiellement dans le symbole que se trouve la clé de cette possibilité humaine de faire l'expérience du sacré - et de tenter d'en parler, de la communiquer.

Les humains, en effet, disposent d'au moins deux modes de pensée: une pensée logique, réaliste, «terre à terre» et unidimensionnelle, qui permet les opérations à la fois scientifiques et techniques sur le réel. Pour ce mode de pensée, par exemple, «une table est une table», «un chat est un chat», et l'eau se «réduit» à sa structure chimique des molécules d'oxygène et d'hydrogène.

Il existe cependant aussi une pensée symbolique, pour laquelle, pour ainsi dire, une chose peut toujours «être autre chose». Plus exactement: elle peut signifier autre chose. C'est bien sûr - entre autres millions d'exemples possibles - à cause de cette capacité symbolique que nous pouvons parler, écrire et dessiner, que nous nous arrêtons aux feux rouges, qu'une fleur peut vouloir dire «je t'aime », et que des humains peuvent accepter de se faire tuer pour un morceau d'étoffe - qui représente un idéal ou une patrie. C'est évidemment sur ce mode de pensée que repose la possibilité même du langage, de la poésie, de l'art. Comme c'est également cette capacité du symbole de signifier autre chose qui, poussée à la limite, permet à l'esprit humain de parler de son expérience du sacré - d'un tout autre qui, par définition, échappe à tout langage adéquat. C'est, donc, avec des mots, des gestes, des objets appartenant à leur expérience de tous les jours, mais chargés de signification symbolique, que les humains, de tout temps, ont tenté de dire leur expérience du tout autre. (Qu'ils existent ou non, les dieux - comme les déesses! - sont toujours dits avec des mots, des gestes et des symboles humains...)

Il découle de tout cela une conséquence importante: si l'expérience humaine du sacré est aussi liée à la capacité symbolique, toute régression de la pensée symbolique entraîne inévitablement un recul de la capacité humaine d'expérimenter le sacré[7]. Cette régression de la pensée symbolique peut prendre diverses formes: ou bien, par exemple, comme cela a été largement le cas dans l'Occident moderne, la pensée logique, rationnelle, scientifique, uni-dimensionnelle, prend le pas sur la pensée symbolique, renvoyant celle-ci, avec plus ou moins de mépris, au monde des «primitifs», des enfants, des poètes ou des fous... Ou, alors, comme ce peut être le cas pour certaines formes de troubles socio-psychiques ou de fanatisme, le caractère symbolique du symbole est perdu de vue: la chose, le symbole (mots, gestes, idées, objets, personnages, etc.) destiné à symboliser le tout autre est lui-même pris pour le tout autre. Le symbole cesse d'être une icône (une image conduisant au tout autre) et devient, au sens strict, une idole (i.e. une image prise elle-même pour le tout autre). A l'inverse, toute recrudescence, toute réhabilitation de la pensée symbolique - comme on peut en apercevoir des indices à notre époque - risque bien sûr de rendre possible une résurgence de l'expérience du sacré.

 

1.3 Le mythe comme récit sacré

L'expérience humaine du sacré ne demeure par ailleurs habituellement jamais purement émotionnelle, intérieure, privée. Elle cherche au contraire à se dire, à se communiquer, à se transmettre, à s'exprimer à travers le langage de la société et de la culture. Elle se traduit en discours (plus ou moins systématiques), en visions du monde (plus ou moins élaborées). Au sens de l'anthropologie religieuse, on peut dire qu'elle engendre des mythes.

Le terme de mythe, on le sait, a souvent un sens péjoratif. Pour la langue courante, comme pour la science positiviste, le mythe, c'est précisément le contraire de la «vérité» (rationnelle, scientifique). On comprend mieux aujourd'hui qu'une telle opposition est aussi inutile que maladroite (et malheureuse): la «vérité» du mythe ne s'oppose pas plus à celle de la science que la pensée symbolique ne «s'oppose» à la pensée logique. Le mythe n'a pas de «prétention scientifique»[8]. D'une manière symbolique, il tente plutôt de dire comment les humains comprennent leur expérience du monde (et du sacré), comment ils donnent un sens, un fondement, à leur vie. Et ce, non seulement au plan intellectuel, mais d'une manière plus globale, qui fait aussi une place au sentiment, à l'émotion, aux passions.

L'humanité, depuis la nuit des temps, a inventé des milliers de mythes, et elle continue vraisemblablement de le faire encore de nos jours[9]. Les contenus de ces mythologies varient considérablement. Leur fonction demeurent cependant essentiellement la même: donner un sens qui fait vivre[10]. On retrouve en outre souvent dans les mythes les mêmes structures fondamentales: un mythe prend généralement, par exemple, la forme d'un récit, au sens à la fois large et précis du terme. Ce récit fait par ailleurs intervenir des acteur hors du commun (il peut s'agir de dieux, de puissances surnaturelles, de héros, de saints modèles, etc.) qui accomplissent des actions également hors de l'ordinaire. Ces actions engendrent pour ainsi dire une réalité nouvelle, inaugurent le commencement de quelque chose de radicalement nouveau, fondent un «idéal». La suite de l'histoire (et notamment le temps présent) est toutefois présentée (dans le récit mythique) comme s'étant éloignée de cette espèce d'âge d'or primordial (à cause d'une usure de l'idéal, d'une «chute» ou d'une «décadence» quelconque, de quelque chose qui s'est détraqué dans le monde, d'obstacles puissants qui ont surgi, etc.). Mais, selon cette pensée, il est possible - et il importe vitalement - d'essayer de retrouver de quelque manière l'«idéal» de ce temps mythique.

Le mythe, au sens où on vient de l'entrevoir, n'a évidemment rien d'un froid compte-rendu journalistique ou d'une austère proposition scientifique. Le mythe est un récit sacré, un récit chaud (au sens macluhanien, pourrait-on dire), vital pour ceux et celles qui le portent. On soupçonne tout de suite une conséquence fort importante, notamment du point de vue de l'observation (surtout lorsqu'elle est «participante»): on ne joue pas impunément, n'importe comment, avec les mythes des gens. Contester, mépriser, critiquer ou ridiculiser un mythe risque évidemment toujours de susciter beaucoup de résistances viscérales, d'agressivité passionnée. Il arrive par ailleurs que des mythes meurent, puissent «être tués». L'histoire de l'humanité a connu des populations entières qui se sont - littéralement - laissées mourir parce que leur mythe, pour quelque raison, ne fonctionnait plus[11], et qu'aucun autre (aussi efficace) ne l'avait remplacé. Même à des échelles moins dramatiques, cela demeure sans doute encore largement vrai aujourd'hui.

 

1.4 La puissance des rites

Le mythe est un récit sacré, parce qu'il porte en lui la possibilité de retrouver le contact avec l'expérience intense- sacrée - qui lui a donné naissance. Le mythe, en ce sens, est un peu comme une partition musicale: il peut être joué; et, quand il est joué, il reprend vie, retrouve la vie qui l'a engendré. Le mythe, sans cesse, se rejoue dans des rites.

«Qu'est-ce qu'un rite?» demandait au Renard le Petit Prince de Saint-Exupéry. Et le Renard de répondre: « C'est aussi quelque chose de trop oublié. C'est ce qui fait qu'un jour est différent des autres jours, une heure des autres heures...» C'est, comme le mythe, quelque chose que la sensibilité moderne, préoccupée par l'«authenticité» et la «spontanéité», a beaucoup décrié, n'y voyant souvent que geste stéréotypé, formel, vide de sens, hypocrite, inefficace, inutile. (Et le fait est, évidemment, qu'il peut arriver que les rites, comme les mythes, se vident de leur substance, ne signifient plus rien du tout...)

Le rite, c'est d'abord la mise en scène, ou en geste, d'un mythe, sa réactualisation, au sens fort du terme. Le rite re-présente le mythe ou, plus exactement peut-être, nous rend présent à lui, nous rebranche sur l'expérience intense, vitale, qui lui a donné naissance, nous fait participer, communier à l'origine, regénère, recharge (comme on le dit d'une batterie) le temps présent à partir de l'énergie même qui est à l'origine du mythe. (L'eucharistie des chrétiens, une fête du 8 mars, un concert rock ou un pèlerinage sur la tombe de Jim Morrisson, une manif anti-nucléaire, une bouffe entre amis: autant de rites, petits et grands qui, plus ou moins intensément, arrachent un moment à la grisaille du quotidien, qui font - un moment - accéder à une réalité «plus vraie», «plus profonde», plus «absolue» que cette «banalité» quotidienne (encore que cette banalité elle-même puisse aussi être ritualisée - donc, «dé-banalisée», en quelque sorte); qui redonne goût, énergie, espoir en cela-même au nom de quoi on a envie de vivre; qui rend déjà (ou de nouveau) présent l'«idéal» - malgré la conscience qu'on a d'en être encore bien éloigné; qui permet d'affronter collectivement l'angoisse de son éloignement; qui, par conséquent, rend la vie possible et vivable (aussi bien d'ailleurs que l'engagement pour la transformer).

Ici encore, bien sûr, une plus longue étude permettrait de creuser davantage, de voir les divers rituels à l'oeuvre dans l'histoire humaine, d'en dégager certaines typologies[12]. (On pense par exemple à ces grands rites universels que sont la fête [13] - on y reviendra -, la danse ou le jeu[14] sacrés, l'initiation, le sacrifice[15]). De même, un texte plus long que celui-ci pourrait s'arrêter à tout ce qui, de quelque manière, participe au mythe et à l'activité rituelle, nous fait quitter un moment la vie ordinaire pour nous introduire dans le monde du sacré: ce peuvent être des lieux (un temple, un paysage...), des temps particuliers (un anniversaire, un samedi soir...), des objets chargés de signification (une icône, un drapeau, une photo, un joint qui circule...), des ambiances (e.g., musicales), des manières particulières de s'habiller, etc. Tel a été, en somme, depuis une centaine d'années, le vaste projet de ce qu'on a appelé la phénoménologie de la religion [16].

 

2. LA DIALECTIQUE DU SACRÉ ET DU PROFANE

La piste suivie jusqu'à maintenant partait en un sens d'un point de départ plus psychologique et individuel, celui de l'expérience du sacré, de ses manifestations (ou hiérophanies, selon le terme technique suggéré notamment par M. Eliade) et de ses prolongements religieux dans les mythes et les rites. Elle donne une sorte de photographie - ou de coupe anatomique, si l'on peut dire - de cette expérience du sacré et de ses principaux éléments. La seconde piste, par comparaison, tente de saisir cette expérience du sacré de manière à la fois plus «dynamique» et plus sociale (collective).

 

2.1 Le sacré et le profane

Le point de départ de cette approche serait la constatation[17] (de nature sociologique et anthropologique, et non pas théologique) de l'existence, dans toutes les cultures humaines (y compris donc, par hypothèse, dans la nôtre), de deux sphères à la fois irréductibles et indissociables, opposées et complémentaires, en rapport dialectique l'une avec l'autre: la sphère du sacré et celle du profane. Les contenus de l'une et de l'autre peuvent varier presque à l'infini d'une époque à l'autre, d'une culture (ou d'une sous-culture) à l'autre: tel objet ou telle expérience, considérés comme sacrés ici et maintenant, ne le sont pas forcément ailleurs, comme ils ne l'ont pas forcément toujours été (et ne le seront pas forcément toujours) ici. Demeureraient constantes et universelles[18], par contre, l'existence et la dialectique de ces deux sphères à la fois opposées et liées.

Bien des définitions ont été proposées de l'une et de l'autre, de l'une par rapport à l'autre (y compris par exemple celle d'Otto, évoquée plus haut). Le philosophe Georges BATAILLE (à qui l'on doit significativement aussi certains travaux remarquables sur la sexualité et l'érotisme[19]), en proposait une qui paraît ici fort intéressante et féconde (et qui a en outre le mérite de s'inscrire dans une tradition d'étude sociologico-anthropologique extrêmement riche du phénomène religieux).

Le sacré, pour Bataille, c'est essentiellement - et, en un sens, très simplement - le bouillonnement prodigieux, le déchaînement exubérant, aveugle et violent de la vie sous toutes ses formes[20]; déchaînement que l'ordre des choses, pour durer, doit de quelque manière enchaîner, endiguer. Se trouve par là-même définie, en contrepartie, la sphère du profane: le profane, dans cette perspective, ce sont justement ces «digues» qui viennent enchaîner, harnacher le prodigieux déchaînement de la vie, et sans lesquelles la vie humaine (en tant qu'humaine) serait impossible.

D'une certaine manière, on pourrait dire que cette dialectique du sacré et du profane est cela même qui, pour le monde humain, tient largement lieu des lois ou de l'instinct qui, dans le cosmos et le monde animal, règlent le cours des choses: lers rivières, en effet, suivent leur cours ou débordent; les volcans dorment ou explosent; les animaux naissent, s'accouplent, chassent ou sont dévorés. Tout cela est pour ainsi dire dans l'ordre - à la fois grandiose et cruel - des choses, échappant à la conscience autant qu'à la liberté.

C'est précisément la conscience humaine qui introduit une sorte de distance entre l'humain et le grand tout cosmique, qui - pour rester proche des concepts de Bataille - introduit du discontinu dans la grande continutité cosmique préconsciente. Par le travail, d'abord, activité rationnelle par excellence, et en particulier par la fabrication d'outils (du silex et de la roue jusqu'à l'ordinateur et à la pile atomique), l'humanité, porteuse de conscience et de raison, prend effectivement des distances par rapport à la «nature». Jusqu'à un certain point, elle prend le relai des lois et des instincts qui la gouvernaient - seuls - jusque là. Elle harnache des rivières,et parfois en assèche; elle domestique - ou détruit! - des espèces animales; elle enraie - ou engendre - des épidémies; elle fait reverdir des déserts - et parfois en crée de nouveaux; elle s'arrache aux lois de la gravité - et pollue la stratosphère...

 

2.2 L'interdit du sacré

Ce faisant, l'humanité endigue cela-même qui devient - ainsi - le sacré: elle pose le sacré dans le mouvement même où elle s'en sépare[21]. Elle enferme pour ainsi dire le sacré dans ce qu'on appellera des interdits (ou des tabous, selon un terme d'origine océanienne fréquemment utilisé en anthropologie et en sciences des religions). Au sens strict, elle interdit le sacré.

À prime abord, cette manière de voir peut paraître paradoxale. On voit cependant qu'il en est bien ainsi, que c'est bel et bien le sacré qui est interdit. Et cela se comprend: laisser libre cours au sacré, à l'exubérance aveugle et violente de la vie, comme les animaux ou les forces de la nature qui ne connaissent pas d'interdits (et que les humains, de ce fait, ont souvent considérés comme particulièrement sacrés, totalement dans le sacré), équivaudrait en effet à dissoudre l'humain dans la nature inconsciente, à retourner au «grand tout» de la continutié cosmique. Laisser libre cours au sacré, pour l'humanité, ce serait au fond courir tout droit à la mort (en tant qu'humanité), un peu comme ces insectes fascinés par la flamme, et qui s'y précipitent... (On comprend bien sûr, et de ce fait, le caractère profondément sacré de la mort elle-même, dans la mesure où celle-ci est perçue comme ce qui fait précisément retourner les humains à la continuité du cosmos.)

 

2.3 Le sacré et la transgression

Mais on le sait bien: si l'ordre - profane - des choses, fondé sur la conscience, la raison, le travail et les interdits, permet l'existence de la vie humaine en tant que telle, il est lui aussi, à sa manière, porteur de mort. Plus exactement: si le profane est bien ce qui rend la vie humaine possible, il n'est pas lui-même porteur et source de vie. Il s'agit bien plutôt d'une digue, d'un barrage, d'un frein. Avec le temps, l'ordre profane se fatigue, se sclérose, s'ankylose, se vide de sa substance (comme on pourrait également le dire d'une pile rechargeable...) Constamment, il a besoin d'être revivifié, régénéré, rajeuni, de se rebrancher - ou de se recharger - sur cet inépuisable réservoir qu'est l'exubérance cosmique de la vie. C'est-à-dire, en somme, sur le sacré.

Constamment, la vie humaine a besoin de lever les interdits qui endiguent le sacré, de les transgresser. La transgression apparaît bien en ce sens à la fois comme l'opposé de l'interdit et comme son complément indispensable. Insistons: la transgression n'est pas la négation, le refus ou l'abolition de l'interdit (contrairement à ce que perçoit souvent la sensibilité contemporaine) mais plutôt sa suspension temporaire, ponctuelle. La transgression affirme à la fois la nécessité de l'interdit (sans lequel il n'y aurait pas de vie humaine possible) et la nécessité de son dépassement périodique (sans lequel la vie humaine se scléroserait).

 

2.4 La religion comme «gestion» du sacré

Dans l'histoire des civilisations humaines, c'est ce qu'on peut appeler, au sens large et fondamental, la religion qui a été l'institution culturelle appelée à «gérer» les rapports entre la sphère du sacré et celle du profane. «La liturgie et les rites des religions positives, suggère à cet égard Franco Ferrarotti[22] au moyen d'une image saisissante, c'est la combinaison d'amiante qui permet d'accéder au sacré sans être réduit en cendres...» De manière plus précise, tels seront la fonction et le rôle particulier de certains personnages et de certaines pratiques (ou rites).

De certains personnages, d'abord: prêtres et prêtresses, chamanes, sorciers et sorcières, - mais également, si l'on prend la religion dans son acception la plus large (qui est retenue ici), héros, leaders, artistes, saints, et mêmes délinquants et criminels, à qui la culture confie (sans nécessairement toujours leur demander leur avis!) la tâche de manipuler d'une manière particulière, et en quelque sorte «au nom» de tous, le rapport au sacré. Tâche ambivalente, comme le sacré lui-même, selon ce que soulignait fort bien Otto: rappelons-nous en effet que le sacré est toujours expérimenté comme étant à la fois fascinant et terrifiant, attirant et repoussant, bénéfique et dangereux. En jouant pour ainsi dire constamment dans le sacré[23], ces personnages transgressent aussi constamment les interdits communs. Ils deviennent eux-mêmes, de ce fait, des personnages sacrés, i.e., comme le sacré lui-même, à la fois fascinants et terrifiants, attirants et repoussants, séduisants et menaçants. Pour le meilleur et pour le pire, ils échappent largement aux contraintes de la vie profane commune (et notamment, bien sûr, à ses contraintes «morales» communes). Ils servent, en somme, d'intermédiaires permanents, de «médiums» à temps plein - ou d'«interfaces» permanents, pour emprunter une image informatique actuelle - entre le monde du sacré et l'humanité profane.

Une distinction assez importante, notamment bien dégagée par Roger CAILLOIS[24] (longtemps lui-même collaborateur de Bataille), mérite d'être ici soulignée: si, en effet, dans cette vision des choses, l'accès au sacré est essentiellement rendu possible par une transgression des interdits; si l'interdit lui-même est bien ce qui sépare le sacré du profane; si dès lors le respect de l'interdit est bien ce qui rend possible la vie profane, - il demeure que ce respect de l'interdit (i.e. de la séparation habituelle rigoureuse du sacré) constitue lui aussi un aspect de l'expérience du sacré. On aurait ainsi en fait, suggère Caillois, une double face de l'expérience du sacré: un sacré de respect, d'une part (lié au respect des interdits), et un sacré de transgression, d'autre part (lié à leur dépassement).

La religion, au sens retenu ici, serait donc, comme on l'a évoqué, l'institution qui orchestre globalement l'un et l'autre de ces aspects[25]. Ce fait n'exclut toutefois pas des «spécialisations», si l'on peut dire (qui peuvent être - mais qui ne sont pas nécessairement - exclusives l'une de l'autre) dans cette gestion de l'un et de l'autre aspect. Ainsi, certains personnages (rites ou moments de l'expérience) relèveront davantage du sacré de respect (et de sa gestion) tandis que d'autres ressortiront plutôt, pour leur part, au sacré de transgression. L'administration quotidienne des interdits, leur légitimation, la sanction de leur application, les rituels de transition entre la vie profane et l'accès au sacré (le bon «mode d'emploi» du va-et-vient entre les deux mondes, pourrait-on dire), tout cela appartient bien sûr davantage au pôle du sacré de respect.

D'autres personnages, et d'autres rites, en revanche, s'inscrivent clairement dans le registre du sacré de transgression. Ce sont par exemple les rites qui donnent à tous, périodiquement (et non seulement aux «spécialistes du sacré», donc), la possibilité de transgresser eux aussi les interdits habituels, et de refaire pour ainsi dire, individuellement et collectivement, le «plein de sacré». La fête, par exemple, quelque forme qu'elle puisse prendre, en demeure sans doute le plus clair prototype. Dans la fête, en effet, le cours de la vie «normale» (profane) est interrompu - et inversé: on dépense au lieu d'épargner; on «fait les fous» au lieu d'être sérieux; on vit «gratuitement» - et dangereusement - au lieu de calculer prudemment...[26] (La fête, de ce point-de-vue, pourrait se distinguer de la cérémonie qui, elle, on le conçoit, relèverait davantage du pôle du sacré de respect)[27].

 

3. SACRÉ ET DÉSACRALISATION CONTEMPORAINE

Ces considérations, hélas bien rapides, soulèvent tout de même une question à la fois assez fondamentale et vertigineuse qu'il est nécessaire d'aborder avant de clore ce bref exposé.

Autant, en effet, on pourrait considérer comme éclairante une telle lecture religiologique de l'expérience du sacré, autant on peut être tenté de penser que notre modernité occidentale (et cela inclut bien sûr la culture québécoise actuelle) a consommé un divorce irréversible avec cet univers même du sacré; que l'homme et la femme de l'Occident moderne appartiennent désormais à un univers inexorablement désacralisé, «désenchanté», à une humanité radicalement différente de cet homo religiosus si bien décrit par Mircea Eliade, par exemple; une humanité qui n'aurait plus accès qu'à de bien maigres et pâles vestiges de ces expériences religieuses dont vivaient nos ancêtres jusqu'à naguère encore, et dont vivent sans doute même encore la majorité de nos congénères ailleurs que dans le monde occidental ou occidentalisé [28].

 

3.1 Sacré domestique, sacré sauvage

Dans un ouvrage fort inspirant et déjà classique, le sociologue Roger BASTIDE[29] confirmait - tout en la nuançant - cette mutation contemporaine, en proposant une distinction fort éclairante entre ce qu'il appelait un sacré domestique et un sacré sauvage. Pour Bastide, nos sociétés occidentales modernes auraient - encore - accès à une expérience du sacré. Mais il s'agirait largement de l'expérience d'un sacré sauvage, conçu et vécu comme explosion pure, happening improvisé et spontané, hors de toute ritualisation ou de toute contrainte sociale: non pas «transgression» mais bien plutôt refus, contestation, abolition de l'interdit, en quelque sorte. (Et on pourrait songer ici à bien des expériences contemporaines liées à la défonce ou à l'overdose, qu'il s'agisse de drogue ou de sexe, de vitesse ou de violence. On pourrait en vérité évoquer de nouveau cette image de l'insecte, fasciné par la flamme, et qui s'y précipite...)

Pour les sociétés traditionnelles, en revanche, le sacré - tel que vécu dans la fête ou dans les rités liés à la sexualité, par exemple - est, à l'inverse, essentiellement un sacré domestique, codé et ritualisé (tout le contraire donc du happening improvisé et spontané), totalement voué à une régénération voulue et contrôlée («fonctionnelle») de la communauté et des individus qui la composent. Les excès et les débordements y sont certes possibles - et c'est même précisément le rôle de la transgression que de leur donner lieu. Mais c'est toujours à l'intérieur de paramètres prévus et de finalités précises. Et cela, aussi bien dans les cérémonies de transe les plus extatiques que dans les rituels érotiques les plus débridés. Après l'effervescence du moment sacré (érotique et/ou festif), l'interdit reprend ses droits et la vie retrouveson cours «normal» - mais pourtant revivifié par cette irruption domestique (et non pas sauvage) du sacré.

 

3.2 Pan-ludisme contemporain

Le philosophe Jean-Jacques WUNENBURGER, dans une étude également fort éclairante où il analyse notamment la réalité moderne (occidentale) de la fête[30], confirme de quelque manière cette lecture de Bastide: parmi les tendances de la modernité qui se sont, selon lui, éloignées du vécu, de la fonction et de la signification de la fête telle qu'elle se vit dans les sociétés traditionnelles, il signale notamment ce qu'il appelle un activisme pan-ludique, i.e., en somme, une attitude (et une croyance) selon laquelle la vie peut et doit devenir un happening non stop, une fête permanente. (Noël tous les jours, en quelque sorte...) Ou, en d'autres termes, une irruption constante du sacré dans le profane, un branchement continuel du profane sur le sacré. Ce qui est non seulement, bien entendu, aux antipodes du rapport au sacré dans les sociétés traditionnelles (où le sacré n'est humainement fécond et vivable que dans la mesure où il est à la fois largement interdit et ponctuellement touché) mais ce qui, en outre, semble bien avoir pour effet de détruire largement la possibilité même d'un «rapport au sacré»: si tout doit être sacré, alors, bien sûr, la dialectique est dissoute, plus rien ne l'est vraiment, tout s'aplatit aux dimensions d'un profane orphelin et banal, mortel d'ennui...

 

*

* *

 

En dépit de toutes ces importantes réserves (qui ont au moins le mérite de nous exhorter à la prudence!) nombreux sont les indices qui, dans toutes les sphères de l'existence, à l'heure actuelle, donnent à penser que les sociétés occidentales contemporaines - et, parmi elles, la société québécoise - ne se sont vraisemblablement pas aussi radicalement désacralisées et sécularisées que certaines interprétations ont pu et peuvent encore le laisser croire; que l'expérience humaine du sacré, loin de s'être définitivement estompée de la conscience contemporaine, tend au contraire aujourd'hui à resurgir de bien des manières - et pour le meilleur comme pour le pire! -, quoiqu'elle se soit largement déplacée vers des objets, des formes ou de lieux de l'expérience différents de ceux auxquels elle était traditionnellement associée (notamment sous la forme religieuse qu'elle a connue dans le catholicisme dominant de notre histoire culturelle)[31].

|page d'accueil | Dr M. | Mister G. | Publications |


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1 Ce texte reprend pour l'essentiel le contenu de: G. Ménard, «Le sacré et le profane, d'hier à demain», dans le collectif Figures contemporaines du sacré : religion et culture au Québec. Sous la direction de Y. Desrosiers. Montréal, Fides, 1986. | retour au texte |

 

2 On parle souvent, ainsi, en des sens finalement assez proches, de «religiologie», de «science(s) des (de la) religion(s)», d'«anthropologie» ou de «phénoménologie religieuse». Des distinctions entre ces termes sont nécessaires quoique ce ne soit pas ici le lieu de s'y arrêter. | retour au texte |

 

3 De R. Otto, cf. en particulier Le sacré. Paris, Payot. | retour au texte |

 

4 On songe également ici, bien sûr, aux inspirantes perspectives de Henri Bergson dans Les deux sources de la morale et de la religion.(Paris, P.U.F. 1962 [1932] ). | retour au texte |

 

5 Que R. Otto désignait par le terme de numineux. Cf. également, dans une perspective proche, l'étude de G. Van der Leeuw: La religion dans son essence et ses manifestations. (Paris, Payot) ainsi qu'une grande partie de l'oeuvre phénoménologique de M. Eliade (notammant: Le sacré et le profane. Paris, Gallimard, 1965; Traité d'histoire des religions. Paris, Payot, 1964). | retour au texte |

 

6 Le philosophe Kierkegaard, dans un sens analogue, parlait de «sympathie antipathique» et d'«antipathie sympathique». | retour au texte |

 

7 Cf., à cet égard, et dans la mouvance des recherches de Gaston Bachelard, les importants travaux de Gilbert Gurand (e.g., L'imagination symbolique. Paris, P.U.F. 1964, et les Structures anthropologiques de l'imaginaire. Paris, Bordas, 1969.) | retour au texte |

 

8 On peut certes aller au-delà de cette simplification dichotomique et soutenir, avec plusieurs courants de réflexion contemporains, que la science (occidentale, moderne) est elle aussi, ultimement, un mythe, i.e. la vision (sacrée) du monde dans laquelle se reflète et se comprend l'Occident moderne, sans cesse rejouée, revivifiée dans le rituel de l'expérimentation. (Voir par exemple, à ce sujet, de G. Ménard et C. Miquel, Les ruses de la technique. Paris/Montréal, Méridiens-Klincksieck/Boréal, 1988.) | retour au texte |

 

9 Cf., e.g., les célèbres Mythologies de R. Barthes (Paris, Seuil, 1957) et, dans cette veine, l'ouvrage plus récent et non dénué d'intérêt de O. Poivre d'Arvor Les dieux du jour. Essai sur quelques mythologies contemporaines (Paris, Denoël, 1985). | retour au texte |

 

10 Cf. également, à cet égard, les inspirants travaux de sociologie religieuse de P. Perger (La religion dans la conscience moderne. Paris, Centurion, 1971, La rumeur de Dieu. Paris, Centurion, 1972). | retour au texte |

 

11 On songe notamment à la fin rapide et tragique de plusieurs grandes civilisations de l'Amérique précolombienne avec l'arrivée de la colonisation blanche. | retour au texte |

 

12 Cf., notamment, de J. Cazeneuve, Sociologie du rite. Paris, P.U.F.,1971; de J.-J. Wunenburger, Le sacré. Paris, P.U.F., 1981. | retour au texte |

 

13 Cf. J.-J. Wunenburger, La fête, le jeu et le sacré. Paris. Éd. universitaires, 1977. | retour au texte |

 

14 Cf., e.g., R. Caillois, Les jeux et les hommes. Paris, Gallimard, 1967. | retour au texte |

 

15 Cf., entre autres, R. Girard, La violence et le sacré. Paris, Grasset, 1972. | retour au texte |

 

16 Cf., entre autres, les travaux cités de Eliade, Van der Leeuw, Caillois, Wunenburger. | retour au texte |

 

17 Cette approche, en bonne partie inspirée des travaux d'Émile Durkheim (notamment: Les formes élémentaires de la vie religieuse. Paris, Alcan, 1925 [P.U.F. 1968] ), a inauguré une vaste tradition - notamment enrichie par les travaux de Hubert et Mauss, par ceux du «Collège de sociologie» (Bataille, Caillois, etc.). On pourra lire avec intérêt le Que Sais-Je? récemment paru sur Durkheim sous la plume du pr. J. A. Prades, du Département des sciences religieuses de l'UQAM. | retour au texte |

 

18 «Il y a dans la religion, écrit ainsi Durkheim [Les formes élémentaires de la vie religieuse. Paris, Alcan, 1925, p. 609], quelque chose d'éternel qui est destiné à survivre à tous les symboles particuliers dans lesquels la pensée religieuse s'est successivement enveloppée.» | retour au texte |

 

19 De Georges Bataille, cf. en particulier, pour ce qui nous intéresse ici davantage, Théorie de la religion. Paris, Gallimard, 1973 et L'érotisme, Paris, Minuit, 1957. | retour au texte |

 

20 Le vitalisme sous-jacent à une telle perspective se retrouvre dans bien d'autres courants de pensée contemporains. On songe à des réflexions aussi différentes que celles de D. Janicaud, par exemple (La puissance du rationnel. Paris, Gallimard, 1985), ou de M. Maffesoli (L'ombre de Dionysos. Paris, Méridiens/Anthropos, 1982; La connaissance ordinaire. Paris, Méridiens, 1985). | retour au texte |

 

21 Dans plusieurs langues, le sacré est précisément et essentiellement aussi le séparé. | retour au texte |

 

22 F. Ferrarotti, Une théologie pour athées. Paris, Méridiens/Anthropos, 1984, p. 39. | retour au texte |

 

23 La proposition est bien sûr réversible: la transgression constante des interdits, l'existence «marginale», «hors-la-loi», par exemple, confère à un individu, pour le meilleur et pour le pire, un caractère «sacré». | retour au texte |

 

24 De Roger Caillois, cf. notamment Le mythe et l'homme. Paris, Gallimard, 1938; L'homme et le sacré. Paris, Gallimard, 1950. | retour au texte |

 

25 Tout comme la complexe gestion des dimensions pure et impure du sacré, autre distinction importante également articulée par R. Caillois (L'homme et le sacré, op. cit.). | retour au texte |

 

26 Cf., à ce sujet, de G. Bataille, «La notion de dépense», in: La part maudite. Paris, Minuit, 1967. | retour au texte |

 

27 On pourrait par exemple en voir une illustration simple et éclairante dans les différences marquant une cérémonie (religieuse ou civile) de mariage et la fête de noces qui suit (l'une pouvant bien sûr introduire à l'autre.) | retour au texte |

 

28 Paradoxalement d'ailleurs - tout au moins à première vue - ce mouvement historique de désacralisation de l'Occident s'enracinerait, selon bien des interprètes, dans la tradition judéo-chrétienne elle-même: dans le farouche monothéisme juif, tout d'abord, qui aurait largement rapatrié vers la figure créatrice du Dieu Unique tout le sacré cosmique; et plus encore sans doute dans le christianisme lui-même, qui aurait largement bouleversé la vieille dialectique du sacré et du profane, - la transgression, notamment, n'y étant plus vécue comme un mode privilégié d'accès au sacré mais, tout au contraire, comme une manière de le défier, de le profaner (au sens moderne et courant du terme). | retour au texte |

 

29 Roger Bastide, Le sacré sauvage - et autres essais. Paris, Payot, 1975. | retour au texte |

 

30 Jean-Jacques Wunenburger, La fête, le jeu et le sacré. op. cit. | retour au texte |

 

31 Ce qui ne signifie évidemment pas qu'elle ait complètement abandonné cette dernière. Dans la perspective anthropologique qui est ici la nôtre, le fait que l'expérience du sacré puisse être repérée dans des lieux différents de ceux que la culture considère comme «religieux» implique en revanche aussi que des lieux traditionnellement associés au religieux puissent se vider largement de toute véritable expérience du sacré. | retour au texte |

 

|Retour au sommaire du "Guide Bleu" |

|page d'accueil | Dr M. | Mister G. |

|Publications | Inédits | Cours |