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Éditorial de Mario Bard,
du Relais Mont-Royal


La gestion du profit ou l'art d'oublier l'être humain

Le nouveau bateau des Hautes Études Commerciales, lancé depuis maintenant deux ans, la toute puissante gestion des affaires, semble être ce qu'il y a de plus " in " en ville. Un édifice moderne qui rend hommage à l'immortel plaisir de compter, gérer, diriger, entreprendre. Vive le royaume de la gestion toute puissante! Encore faut-il que cette gestion toute puissante soit au service de l'être humain. Depuis quelques années, il me semble que le management, nom anglais de la gestion, prend une forte tangente vers la gestion des profits de l'entreprise. Au nom de la mondialisation des marchés, nous vivons la grande " Ère " du néolibéralisme libérateur. Facilité d'importation et d'exportation, vibration supra naturelle du profit tout puissant, jubilation presque à chaque mois à la bourse de New-York. Les profits grimpent en flèche et survivent à nos pertes d'emplois. Ils sont même de plus en plus gras.

J'avoue : j'en connais peu sur les cours de gestion d'une entreprise. Tout ce qu'en j'en connais, ce sont les descriptions de programme que j'ai regardé sur le site Internet des HEC. D'après ce que j'y ai lu, gérer une entreprise, c'est faire en sorte qu'elle soit productive, concurrentielle, efficace, vivante. Je suppose aussi qu'elle doit faire une place privilégiée à ses employés qui sont les moteurs même de l'entreprise. Sans eux, pas d'entreprise puisque, sans le manutentionnaire, le secrétaire, le comptable (femme ou homme…), l'entreprise ne peut fonctionner, prendre un envol qui soit digne de ce nom. On ne peut créer virtuellement les gens ni les transports. Et même si un jour on peut réussir le transport virtuel d'un corps (comme dans la célèbre série Star-Treck) nos molécules et cellules demeureront humaines. L'être humain demeure le centre de la création. Jusqu'à nouvelle ordre...

Car le nouvel ordre mondial semble commander une toute autre chose. C'est le profit qui semble compter dans la vision des gestionnaires. Et cela m'effraie. Car, si ceux qui gèrent les entreprises ont la pensée complètement dirigée vers le profit, je crains qu'ils n'aient infecté nos pensées. Nos yeux sont très souvent dirigés vers le profit à tout prix dans nos propres schémas de vie. Pourquoi être gratuit quand on peut tirer d'une situation le meilleur de celle-ci, de façon raisonnable, calculée et contrôlée. La gratuité fait partie des idées farfelues que déposent souvent les utopistes sociaux qui peuplent l'univers de cette fin de siècle. La gratuité, c'est fait pour les autres. Moi, je travaille fort, il faut qu'on me paie tant, de plus en plus, avec un salaire concurrentiel, des avantages concurrentiels. Et c'est notre droit. Mais au nom de ce droit, les grands entrepreneurs se permettent une gestion de plus en plus serrée de l'entreprise. " Pour offrir une meilleur qualité et une efficacité accrue, il faut couper du personnel. " " Serrez-vous la ceinture, pour le mieux être collectif ", disent sagement les gouvernements en écoutant Wall Street dicter la conduite. Malheureusement, Wall Street ne nourrit qu'une infime partie de la population mondiale. Wall Street, c'est une rue à New-York city. Qu'est-ce qu'elle en a " à foutre " avec Montréal et ses mendiants. Strictement rien. Les hommes et les femmes qui y travaillent sont abriter dans de hautes tours et analysent des grilles, des entrées, des sorties, ils analysent la santé de l'économie. Mais ces grilles ne nourrissent personnes. Ou seulement les actionnaires des grandes entreprises. Mais ils sont si peu nombreux...

Je sais. Mon analyse est simple. Même un peu simpliste. Je suis désolé, mais je constate qu'autour de moi, plusieurs personnes que je connais se cherchent de l'emploi. Quand ils en trouvent, il est souvent précaire. La précarité est maîtresse dans notre esprit. D'où un taux élevé d'inquiétude, d'où un certain cynisme, d'où un manque de goût à la vie, d'où un taux élevé de suicide… La gestion du profit ne devrait-elle pas passer dans la gestion du mieux être de la collectivité et pas seulement d'une minorité d'actionnaires richissimes qu'on envie? Si, en tant que société, nos profits ne passent pas par le souci de " la gestion de l'argent en Dieu " (Mère Térésa), alors notre recherche du profit est vaine. " J'étais nu et vous m'avez vêtu, j'étais prisonnier et vous m'avez visité " (évangile, Matthieu 25, 36) . La gestion du profit devrait peut-être nous apprendre à nourrir et à vêtir. Non seulement au sens réel mais aussi au sens figuré. J'apprends à respecter l'être humain, je nourris son intelligence et je le libère de ses chaînes intérieures. C'est aussi une façon de gérer le profit.

Mario Bard

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