La POULE AU POT Henri IV


Voici une vieille recette française traditionnelle et succulente qu'il vaut la peine d'essayer au moins une fois dans sa vie, quand on prévoit recevoir plusieurs convives.

La légende en fait remonter l'origine au roi Henri IV -- oui, oui, le mari de la reine Margot --, qui devint (mais l'histoire ne dit pas si c'est à cause de ça!) le plus populaire des rois de France... C'est que le bon roi, que l'on disait assez porté sur les... galanteries, avait aussi des préoccupations plus... sociales, et tenait à ce que même la plus humble chaumière de son royaume puisse mettre, au moins le dimanche, «une poule au pot» -- le «pot» étant bien sûr la grosse marmite qui pendait dans l'âtre des cheminées et dans laquelle les familles faisaient cuire... ce qui leur tombait sous la main, «à la fortune du pot»...

 

Pour préparer cette recette, il faudra donc prévoir:

 

Pour la préparation de la farce

Accompagnements de la cuisson de la poule

N.B. Si jamais il vous restait des légumes, ils ne seront pas perdus: vous en tirerez un excellent potage, au blender, avec un peu du bouillon de la poule.

 

Préparation de la farce

Émincez le coeur de poulet, l'échalote et l'oignon. Ajoutez le porc haché, les feuilles de persil, les épices ainsi que le foie, et assurez vous que le tout est haché aussi menu que les trois enfants miraculeusement ramenés à la vie par saint Nicolas.

Vous aurez fait tremper la mie de pain dans du lait. Essorez-la et joignez-la au hachis. Salez, donnez quelques tours de poivre du moulin, triturez bien le tout après y avoir versé un oeuf ou deux. Mais commencez par un -- et voyez comment cela se tient. Il ne faut pas que cela soit trop liquide.

Selon la méthode traditionnelle, il s'agit alors de farcir la poule de cette préparation puis de coudre, avec une grosse aiguille et de l'assez gros fil, tous les orifices de la volaille. Mais c'est un peu compliqué pour nos moeurs postmodernes, notamment au moment de servir. Et vous aurez autre chose à faire, quand vos amis seront là, que de vous désâmer dans la cuisine...

Il y a une solution de rechange. Dans ma famille, d'ailleurs, on servait bien la volaille avec une «farce» -- mais cette farce était cuite à part, non à l'intérieur de la poule (ou de la dinde, selon). Ce qui m'a d'ailleurs longtemps intrigué, je l'avoue (pourquoi diable, alors, appelait-on ça une «farce»?! C'était... une farce ou quoi???)

Mais je suis un jour tombé sur une vieille recette française où l'on suggérait un truc -- dont j'ai eu allègrement envie de m'inspirer ici -- au cas où toute la farce préparée n'aurait pas tenu à l'intérieur de la volaille: il s'agit simplement d'envelopper le reste dans une mousseline (c'est-à-dire dans quelques bonnes épaisseurs de ce que nous appelons du «coton à fromage»), de bien ficeler le tout, et de le joindre à la cuisson. Je suggère donc de faire ainsi cuire TOUTE la farce. Celle-ci parfumera tout de même la poule et le bouillon, et elle se servira beaucoup plus facilement le moment venu.

Une fois cela fait, il s'agit de déposer la poule dans une très grande marmite (si vous en avez une pour faire cuire les épis de maïs, ça devrait aller), avec le jambon (si vous décidez d'en augmenter la poule) ainsi que les légumes d'accompagnement, et de couvrir d'eau froide. On amène à ébullition et on laisse mijoter à petit feu et à couvert une heure ou une heure et demie, selon la grosseur de la poule. Mais il vaut mieux vérifier de temps en temps et arrêter la cuisson quand la viande est tendre, quitte à réchauffer au moment de servir. Goûtez, ajouter un peu de sel si nécessaire.

Idéalement, on dresse la poule sur un grand plat (qu'on aura fait réchauffer au four doux quelques instants) et on l'entoure des légumes en les retirant délicatement de la marmite pour ne pas les briser. Mais il est sans doute plus simple de prendre un plat pour la poule et un ou deux autres pour les légumes -- et le jambon, si vous décidez de le servir.

Si vous avez du cran, apportez tout cela à la table et, une lueur de triomphe modeste dans la pupille, détaillez la poule et le jambon devant vos hôtes impressionnés. Et retenez bien sûr l'histoire de l'origine de ce plat pour la «conversation»...

 

Le bouillon -- que vous pourrez congeler après l'avoir laissé refroidir, passé au tamis et éventuellement dégraissé -- vous servira de remède miracle les jours ou vous douterez de votre prédestination ou, du moins, de votre victoire dans le combat acharné que vous livrerez à une vicieuse grippe. Servez-vous en une bonne tasse, ou utilisez-le comme base de soupe. Vous verrez: c'est à la soupe Lipton ce que les idées platoniciennes sont à leurs pâles reflets en notre bas-monde...

Mais vous pouvez bien entendu aussi servir ce bouillon à vos convives, en entrée.

Vous aurez alors fait griller d'avance de minces tranches de pain que vous disposerez au fond des assiettes à soupe en les recouvrant d'une bonne couche de gruyère râpé avant d'y verser le bouillon brûlant -- qui mettra l'eau à la bouche de vos amis en attendant... l'héritage du bon roi Henri IV...

Il est traditionnel de servir, avec la poule au pot, des petits cornichons, de la moutarde forte (de Dijon ou de Meaux) et un ravier de gros sel.


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